Après une enfance tourangelle, Balzac arrive à Paris à 15 ans. Il emménage avec ses parents rue du Temple, avant d’être admis à la pension Lepître, 37 rue de Turenne, puis à l’institution de l’abbé Ganser, rue de Thorigny, en suivant les cours du lycée Charlemagne. A 19 ans, quand ses parents déménagent à Villeparisis, Balzac loge dans une mansarde de la rue de Lesdiguières, occupé à écrire des monographies, tandis que sa maîtresse, Mlle de Berny, habite près du marché des Enfants rouges, 17 rue Portefoin. S’il achève sa vie dans dans ses demeures cossues de Passy et de la Folie Beaujon, l’écrivain passe sa jeunesse dans le cœur de Paris, où se situe en outre Le Rocher de Cancale, rue Montorgueil. Du boulevard du Temple au Pont-Royal, balade au fil de lieux chers à Balzac et à ses personnages, avec des extraits de ses œuvres.
1. La pension Lepître (Le Lys dans la vallée)
Au 37 rue de Turenne demeure toujours un bâtiment de ce vaste hôtel de Joyeuse, qui accueillit en 1804 la pension Lepître, dont Balzac fut pensionnaire.
« Mon père conçut quelques doutes sur la portée de l’enseignement oratorien, et vint m’enlever de Pont-le-Voy pour me mettre à Paris dans une Institution située au Marais. J’avais quinze ans. (…) La pension était installée à l’ancien hôtel Joyeuse, où, comme dans toutes les anciennes demeures seigneuriales, il se trouvait une loge de suisse. Pendant la récréation qui précédait l’heure où le gâcheux nous conduisait au lycée Charlemagne, les camarades opulents allaient déjeuner chez notre portier, nommé Doisy. »
2. Les cafés du boulevard du Temple (Illusions Perdues)
Le boulevard du Temple, surnommé boulevard du crime, concentre quelques lieux de plaisirs balzaciens, comme le Panorama-Dramatique au numéro 48, ou le théâtre de la Gaîté, dans la portion détruite par Haussmann pour aménager la place de la République.
« Le Panorama-Dramatique, aujourd’hui remplacé par une maison, était une charmante salle de spectacle située vis-à-vis la rue Charlot, sur le boulevard du Temple, et où deux administrations succombèrent sans obtenir un seul succès, quoique Bouffé, l’un des acteurs qui se sont partagé la succession de Potier, y ait débuté, ainsi que Florine, actrice qui, cinq ans plus tard, devint si célèbre. Les théâtres, comme les hommes, sont soumis à des fatalités. »
3. La rue de Normandie (Le Cousin Pons)
Le quartier des Provinces sert de cadre au Cousin Pons, à l’instar de la rue de Normandie où demeure le héros avec son ami Schmucke.
« La rue de Normandie est une de ces rues au milieu desquelles on peut se croire en province : l’herbe y fleurit, un passant y fait événement, et tout le monde s’y connaît. Les maisons datent de l’époque où, sous Henri IV, on entreprit un quartier dont chaque rue portât le nom d’une province, et au centre duquel devait se trouver une belle place dédiée à la France. (…) La maison où demeuraient les deux musiciens est un ancien hôtel entre cour et jardin ; mais le devant, sur la rue, avait été bâti lors de la vogue excessive dont a joui le Marais durant le dernier siècle. Les deux amis occupaient tout le deuxième étage dans l’ancien hôtel. »
4. Le Palais-Royal (Illusions perdues)
Ce lieu hétéroclite réunissant librairies, échoppes, restaurants et filles de joie est très fréquenté par les personnages de La Comédie humaine, qui déjeunent aux Frères provençaux ou chez Véry, lequel finira absorbé par le Véfour. Entre 1784 et 1826, des « Galeries-de-Bois » émergent face à la galerie de Beaujolais :
« On se donnait rendez-vous dans ces galeries avant et après la Bourse. Le Paris des banquiers et des commerçants encombrait souvent la cour du Palais-Royal, et refluait sous ces abris par les temps de pluie. La nature de ce bâtiment, surgi sur ce point on ne sait comment, le rendait d’une étrange sonorité. Les éclats de rire y foisonnaient. Il n’arrivait pas une querelle à un bout qu’on ne sût à l’autre de quoi il s’agissait. Il n’y avait là que des libraires, de la poésie, de la politique et de la prose, des marchandes de modes, enfin des filles de joie qui venaient seulement le soir. »
5. Le pont Royal (La peau de Chagrin)
Avant d’entrer dans le magasin d’antiquités où il achètera la mythique peau de chagrin, Raphaël manque de se jeter dans la Seine depuis le pont Royal.
« Il s’achemina vers le pont Royal en songeant aux dernières fantaisies de ses prédécesseurs. (…) Arrivé au point culminant de la voûte, il regarda l’eau d’un air sinistre. — Mauvais temps pour se noyer, lui dit en riant une vieille femme vêtue de haillons. Est-elle sale et froide, la Seine ! Il répondit par un sourire plein de naïveté qui attestait le délire de son courage, mais il frissonna tout à coup en voyant de loin, sur le port des Tuileries, la baraque surmontée d’un écriteau où ces paroles sont tracées en lettres hautes d’un pied : secours aux asphyxiés ».
Fort heureusement – voire miraculeusement -, à l’instant fatidique, des amis de Raphaël passent par là et l’emmènent faire la fête dans un appartement du quartier latin.
Tous les paragraphes en italique reproduisent des extraits de La Comédie humaine.
Pour déambuler dans d’autres quartiers de Paris en suivant les pas de Balzac, rendez-vous ici…
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