Qu’est-ce que le musée national du Moyen Âge ?
Il a été créé en 1843 et ouvert aux visiteurs en 1844, à la suite d’un concours de circonstances. Alexandre du Sommerard, un des plus précoces amateurs du Moyen Âge au 19e siècle, s’était installé à la fin de sa vie dans un appartement qu’il louait au premier étage de l’hôtel. À sa mort, l’État a racheté la collection, l’ensemble de l’hôtel, et s’est fait céder par la ville de Paris les thermes et le dépôt lapidaire qui y avaient été installés depuis le début du 19e siècle. C’est ainsi que le musée de Cluny associe depuis 1843 le bâtiment gallo-romain (les thermes), l’hôtel des abbés de Cluny de la fin du Moyen Âge, et deux collections : l’une tournée vers les éléments de l’architecture et les sculptures venant du sol parisien, et une collection d’amateurs qui comprenait des objets d’orfèvrerie, des tapisseries, de la céramique, des ivoires, des meubles, etc. Ainsi, nous avons aujourd’hui une riche collection de sculptures médiévales et une grande variété d’objets précieux et des « arts décoratifs », comme on en trouvait dans les collections d’amateurs au 19e siècle.
C’est aussi un témoignage unique de l’histoire de Paris…
Complètement. Ce musée est un des hauts lieux de l’histoire parisienne, histoire archéologique d’abord puisque les fouilles ont mis en évidence le fait que le site était occupé avant la période gallo-romaine. Avant Lutèce, il y avait ici des implantations, au flanc de la colline Sainte-Geneviève (et non uniquement sur le haut de la colline ou dans l’île de la cité). Concernant l’époque gallo-romaine, le plus important des bâtiments de thermes, pour les substructions et les constructions qui en sont conservées, est maintenant englobé dans le musée.
Qu’en est-il de l’histoire postérieure ?
Les restaurations récentes l’ont bien mise en valeur : dans les parties enfouies, vous pouvez visiter à la fois des espaces annexes de l’établissement de thermes, des espaces qui ont été voûtés à l’époque médiévale, mais aussi des caves des maisons des 17e et 18e siècles installées dans ces anciens bâtiments. L’histoire se poursuit au 20e siècle avec une nouvelle couverture pour une ancienne cour devenue salle du musée en lien avec l’installation des sculptures venant de Notre-Dame de Paris. Et elle se poursuit de nos jours avec le bâtiment de l’architecte Bernard Desmoulins, maître d’œuvre de la construction du nouvel accueil, qui se place avec modestie à la suite de cette histoire architecturale parisienne.
Un mot sur ces travaux récents…
Depuis longtemps, mes prédécesseurs avaient mis en évidence le besoin de travaux au sein du musée, parce que nous manquions d’espace pour l’accueil du public et pour les collections. Puisque l’État n’était pas en mesure de faire ces travaux nous nous sommes concentrés sur l’indispensable et l’essentiel : les restaurations d’une part et les conditions d’accueil d’autre part. Ces deux étapes ont été franchies. La prochaine étape est la réforme des parcours : créer un circuit de visite accessible physiquement et intellectuellement.
Un nouvel accueil qui ouvre le musée sur la ville
À l’issue du concours lancé en 2015, l’architecte Bernard Desmoulins s’est distingué par un projet marqué par sa discrétion, son respect, en évitant le pastiche et sans chercher à s’effacer. Choix de couleurs et des matériaux, calepinage des façades avec des plaques de fonte d’aluminium : tout a été conçu pour ne pas écraser les architectures gallo-romaines qui avaient été pastichées par l’architecte du 19e siècle. Sur la façade, un motif ajouré reprend celui du tambour de l’escalier de la chapelle. L’entrée du musée, auparavant située dans les anciennes cuisines, est désormais rue du Sommerard. Commencés fin 2016, les travaux ont été achevés pour l’inauguration du 13 juillet 2018.
« La mairie du 5e tenait beaucoup à cette meilleure insertion urbaine, tant pour les visiteurs que les habitants du quartier, commente la directrice du musée. Cela passe par la réouverture du jardin public (le square et le jardin d’inspiration médiévale) et une mise en valeur des façades depuis les grands boulevards haussmanniens, Saint-Michel et Saint-Germain. » L’idée est d’intégrer l’ancien jardin des abbés dans le parcours de visite archéologique et monumental dès 2020 tout en augmentant la surface du square ouvert au public.
300 000
C’était le nombre de visiteur annuels jusqu’en 2015, année des attentats. Durant la période de travaux, la fréquentation a baissé. Elle devrait retrouver son niveau antérieur et se développer.
L’exposition Magiques Licornes
La Dame à la Licorne, dont le contexte de création reste mystérieux, est une pièce maîtresse du musée. À la fois allégorie des cinq sens et itinéraire de l’amour courtois, cette tenture se compose de six tapisseries envoûtantes. Actuellement entreposée dans une salle rouverte en 2013, elle se trouve à proximité immédiate du nouvel accueil. Ce qui a naturellement permis de l’inclure dans un nouveau parcours d’exposition qui explore la mode de la Licorne autour de 1500 et sa mode actuelle. Tandis que cette exposition se prolonge jusqu’au 25 février 2019, une autre a commencé le 10 octobre, consacrée à la « Naissance la sculpture gothique » entre Saint-Denis, Paris et Chartres. Soit « la plus grande exposition de sculptures médiévales à Paris », selon Mme Taburet-Delahaye.
La société des Amis du musée de Cluny
La société des Amis du musée de Cluny apporte un soutien essentiel au musée, en participant à l’acquisition de nouvelles œuvres et en proposant des visites à l’intérieur ou à l’extérieur du musée. « Elle soutient nos conférences, nos prises de paroles, nos rencontres. Elle accompagne cette démarche d’explication de la pensée, de la culture et de l’art du Moyen Âge », précise Mme Taburet-Delahaye.
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